De nombreuses études ont montré une forte corrélation entre le nombre d’années d’études et les revenus des filles et femmes en Afrique. C’est ce qu’ont annoncé les experts du Centre international pour l’éducation des filles et des femmes en Afrique (UA/Cieffa) récemment réunis à Nairobi au Kenya, dans le cadre d’une conférence-débat sur les conséquences économiques de la non-scolarisation des filles dans le continent noir.
Dans la même optique, cette institution spécialisée de l’Union africaine depuis 2004 et dont le centre est basé à Ouagadougou, au Burkina Faso, a fait remarquer que le manque d’éducation et de compétences des élèves d’aujourd’hui aura des répercussions économiques à long terme. Les pays les plus touchés par des taux élevés d’abandon scolaire subiront de ce fait une perte significative de compétences et d’éducation au sein de leur population jeune. Il leur sera également plus difficile d’atteindre l’objectif de développement durable des Nations unies, consistant à assurer une éducation inclusive et équitable de qualité et à promouvoir les opportunités pour tous tout au long de la vie.
Qui dit non-scolarisation dit pauvreté
La non-scolarisation des filles ne leur permet pas de sortir de la pauvreté. Cette situation risque de se perpétuer à la génération suivante car une fille non-éduquée ne peut pas comprendre l’intérêt de donner à ses enfants une éducation de qualité, selon la même organisation. Et pourtant, chaque année passée par une fille sur les bancs de l’école augmente son futur revenu de 10 à 20 %.
La non-éducation des filles est un véritable manque pour le développement des pays. Une année de scolarisation supplémentaire fait progresser le produit intérieur brut (PIB) annuel d’un pays de 0,37 %, d’après la même source. La non-éducation des filles présente aussi un risque important pour leur santé et celle de leurs enfants. Une fille non scolarisée aura plus de difficultés à accéder et à suivre les recommandations et les conseils de prévention et de soins pour elle-même et ses enfants. Un enfant né d’une mère qui sait lire a 50 % de chances en plus de survivre après l’âge de 5 ans.
Coût économique monumental
Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale, de l’Unesco et de l’Unicef, le coût économique de ces perturbations à l’échelle africaine et mondiale aura été monumental. «Cette génération d’étudiants risque aujourd’hui de perdre 17.000 milliards de dollars en valeur actualisée, soit environ 14 % du PIB mondial actuel, en raison des fermetures d’écoles liées à la pandémie de Covid-19», indiquait le rapport.
En Afrique, le Covid-19 a exclu toute une génération du système éducatif. Des millions d’enfants de pays africains à revenu faible ou intermédiaire ne sont pas retournés à l’école à la réouverture pour diverses raisons. Parmi celles-ci, la perte des moyens de subsistance de la famille pendant la pandémie, qui a affecté la capacité des parents à payer les frais de scolarité. En Afrique du Sud, on a estimé que 750 000 élèves ont abandonné l’école au cours de la première année de la pandémie. Selon une étude, 10 % des personnes interrogées ont déclaré qu’au moins un enfant de leur foyer n’était pas retourné à l’école en 2021. Une étude menée au Kenya a révélé que 16% des filles et 8 % des garçons n’étaient pas retournés à l’école en 2021, après près d’un an de fermeture des écoles. Ruth Kagia, directrice adjointe du cabinet du président, a déclaré que les conséquences négatives des taux élevés d’abandon scolaire se feront sentir pendant des décennies : «La pandémie aggrave les inégalités préexistantes, expose les vulnérabilités des systèmes sociaux, éducatifs et économiques qui, à leur tour, amplifient les effets de la pandémie». La non-scolarisation des filles présente, au demeurant, de graves conséquences sur la vie de chacune d’entre elles, mais aussi sur le développement de leur communauté et de leur pays tout entier.